Un conte de Péguy, recueilli par R. Johannet
il y avait une fois un homme qui s’ennuyait, mais qui s’ennuyait…
On ne pourra jamais dire combien s’ennuyer cet homme-là.
Sa vie était tellement grise, terne, morne. Il s’ennuyait tout le long de la journée.
Mais cet homme s’ennuyait tout le long de la journée, qui s’ennuyaient le matin,
sept hommes qui s’ennuyaient le soir, savait que, pour sortir de son ennui, il n’avait qu’à commettre un gros péché.
Un gros péché, énorme, gigantesque. Un gros péché, qui le disent ennuierait une fois pour toutes. Une faute sans pareil.
Et cette faute était ainsi faite que, pour la commettre une fois pour toutes, cet homme n’avait qu’à écrire une lettre.
Rien qu’une lettre. Une lettre de rien du tout. Prendre là une feuille de papier
(Péguy faisait les gestes, la scène se passait dans son cabinet),
le mettre sur son bureau, bien devant soi, tremper la plume dans l’encrier, écrire, sécher, cacheter, timbré, expédié.
Cela y était. Une fois pour toutes. Ça lui aurait donné de l’occupation pour toute sa vie.
Plusieurs fois, il avait dit : « non, c’est trop bête, à la fin, je m’ennuie trop” , mais s’il il s’était toujours arrêté à temps…
Feux de France – Février 1946 – n°66 – Guides Aînées
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AC-6664
Catégorie : Feux de France
Description
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Poids | 0,12 kg |
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